Johnny a tué mon père de Elsa LEVY

Résumé éditeur :

Le 5 décembre 2017, Johnny Hallyday meurt. La France est en deuil. Quelques heures plus tard, au fin fond de l’Aquitaine, Bernard Langlois meurt à son tour, dans l’indifférence la plus totale. Comme un con.

Sa fille, Louise, est dévastée par cette disparition subite. Elle n’en a rien à cirer de ce plouc de Johnny mais elle ne parvient pas à échapper au battage médiatique. Malgré tout, Louise, coincée dans les préparatifs des funérailles aux côtés de sa mère fantasque, trouve quelques moments de respiration en regardant les émissions sur Johnny. Et finit par y prendre goût. Elle découvre en lui un homme admirable, une sorte de héros insoupçonné.

En parallèle, Louise change de regard sur son père. Bernard Langlois n’a  finalement rien d’un héros. Pire, sa mort est même une délivrance inattendue. Si Louise a déjà écrit des tonnes de romans dans sa tête, cette fois, libérée du jugement de son père, elle décide de coucher cette histoire sur papier et décrire son prochain roman.

Pour lire le premier chapitre rdv sur : http://www.elsa-levy.com/johnny-a-tue-mon-pere

★★★★☆ Lecture agréable

Critique :

Louise Langlois enterre son père au même moment où Johnny né Smet et dit Halliday cesse d’exister pour les siens et surtout pour les autres. Ses fans et ceux qui, jusque là l’ignoraient, ne l’appréciaient pas, se trompaient sur lui, bref le reste du pays, et plus encore.

Entre funérailles nationales, pour l’un, retranscrites sur presque tous les écrans, et, enterrement orchestré au rythme d’un concerto pour quelques instruments seulement chez les autres, ce petit roman nous promène d’un groupe à l’autre grâce aux réflexions de la douce Louise.

LE père était proviseur, un pur produit de la bureaucratie bien pensante de la grande Education Nationale, et de surcroît détestait Johnny, ou plutôt non … le méprisait, pensait n’avoir aucun point commun avec lui, etc…

Les quelques heures qui ont séparé ces deux morts respectives sont l’occasion à cette jeune fille de faire un arrêt sur images, d’observer les gens qui l’entourent, ceux qui sont sur l’écran, mort ou vifs, puis, au-delà du chagrin, de s’auto-analyser suffisamment fort pour dresser des portraits sans concession. Y compris le sien.

Comme avec sa précédente narratrice (dans le très bon « Bouddha boudoir »), Elsa Levy nous offre ici aussi une déambulation réflexive pour une jeune femme quelque peu désabusée.
 » En fait, tout m’épuise. J’ai 25 ans et la vie m’épuise« .
Sans tristesse, sans pathos, la jeune femme se questionne et nous renvoie à nos pseudo certitudes. Tout le monde en prend pour son grade, et ça fait un bien fou. Son style souvent oralisé, et cash parfois, me plaît toujours autant.

Tout en regardant ses proches et les autres, mais aussi ce qu’elle a vécu avec son père, la douleur et le choc mettent à jour – subrepticement -une pénible sensation de ne pas s’appartenir, d’oppression à soi et au monde qui détonne.

Entre effondrement dû au deuil et petites mesquineries du quotidien, entre souvenirs d’une vie manquée et aspirations masquées d’une (bientôt) trentenaire, la façon, presque psychanalytique qu’Elsa Lévy a de lier ces deux événements est originale. Quand la mort d’une vedette éclaire un décès intime et révèle une fille chagrinée à soi-même. Comment le rock de Johnny et tout le cérémonial télévisé de sa mort réactive ou annihile les douleurs, aide au travail de deuil.

Écrasée par cette perte paternelle, dans ce périple mortifère, la vision du tralala autour du rocker national à la télé permet en quelque sorte à une jeune fille de comprendre les événements autrement.

Évidemment, il y a encore l’écriture à la fois simple et appuyée d’Elsa Lévy qui m’a ravie. Seul regret dans cette lecture, une baisse d’intérêt de ma part au milieu du texte. Peut-être est-ce simplement dû au fait que je suis devenue (particulièrement) allergique aux enterrements ?
J’aurais aussi apprécié un peu plus de mordant.
Mais n’est-ce pas ce arrive parfois quand on lit énormément ?

Dans chacun de ses romans, Elsa Levy crie le besoin de  » délivrance absolue  » des êtres humains, et j’apprécie cet aspect.

Dans « Johnny a tué mon père », les reproches abondent en filigrane…et Freud sera satisfait, la vie peut commencer pour Louise (encore faudra-t-il mettre de la distance avec la maman !!!).

J’espère d’autres héroïnes dans cette veine, parce qu’elles me plaisent toujours autant !

Dans ce verdict implacable, Elsa Levy fait de nos mœurs étranges, à l’occasion des funérailles, une invitation à lâcher prise et à chérir notre indépendance. Sans rébellion mais assurément !

 

 

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