Dîner avec Edward d’Isabel VINCENT

Résumé éditeur

La porte s’ouvrit brusquement, laissant apparaître un grand monsieur âgé, ses yeux souriant tandis qu’il me prenait la main et m’embrassait sur les deux joues. « Ma chérie ! Je vous attendais. »

Afin d’apaiser une amie installée loin de New York et de son père nonagénaire, Isabel accepte d’aller dîner avec Edward, dévasté par la récente disparition de son épouse. Journaliste, la quarantaine, Isabel traverse aussi une crise : à peine débarquée dans la Grosse Pomme, elle assiste impuissante au naufrage de son mariage. Mais ce qu’elle ignore, c’est qu’Edward possède d’époustouflants talents de cuisinier, alliés à un sens de l’humour sans faille et à une solide philosophie de l’existence. Pour son hôte, le vieil homme repasse derrière les fourneaux. Et l’invitation ponctuelle devient un rendez-vous régulier, l’occasion pour les deux âmes en peine de reprendre goût à la vie, et foi dans les bienfaits d’un verre de martini !

★★★★☆ Lecture agréable, fort plaisante… mais ça aurait pu être ENCORE mieux.

Critique

Si vous avez aimé la rencontre entre Claude le routinologue et Camille la mère de famille dépassée de Ta vie commence quand tu comprends que tu n’en as qu’une, si vous êtes gourmet (e), si vous aimez la (très) bonne cuisine, alors ce livre est fait pour vous.
Mais pas seulement.
Après un début laborieux, car je ne croyais pas vraiment à cette insolite rencontre (je découvrirai finalement que ce roman est autobiographique après l’avoir fini ! ), je me félicite d’avoir insisté dans cette lecture y relevant, dès le début, un je-ne-sais-quoi de profondément humain qui me disait
« Poursuis…. Ne t’arrête pas ».
Je ne le regretterai pas.

Il y a d’abord cette ode à la grande cuisine, la vraie, celle qui permet la rencontre entre le bon produit de terroir ou de l’artisan, et le savoir-faire du cuisinier traditionnel. Pas le cuisinier des émissions culinaires, non, celui qui sait encore ce qu’est un vrai fond à base de « demi-glace » et qui connaît l’art délicat des sauces composées élaborées avec soin. Celui qui ne compte pas ses heures pour cuire son poulet, qui sait que les œufs brouillés se font en trois étapes au moins, etc, etc …
Ecouter les cuisiniers comme tels parler de leur Art m’a toujours époustouflée, car en tant que petite-fille de cuisiniers, dans ma bibliothèque « Le manuel du restaurateur » de H.HEYRAUD publié en 1920 (ayant appartenu à l’un de mes grands-pères) raconte exactement « ça », cette cuisine INCROYABLE dont se délectent les invités d’Edward tout au long de ce roman singulier.
Amateurs de Picard et Mac Do passez votre chemin, vous ne comprendrez rien aux joies créatives de cet amateur de délicate chair qui puise son inspiration dans son immense savoir et également dans son amour des autres.
Mais, dans sa cuisine, ce nonagénaire enseigne aussi à Isabel des préceptes « bien plus fondamentaux que les techniques du volailler ». Non pas que l’auteure use et abuse de métaphores (elle est trop maline pour ça), son écriture intelligente lui permet avant tout de louer aussi le partage, l’amitié et le respect de l’autre, quel qu’il soit.

Vous l’aurez compris, ce texte est plus profond qu’il en a l’air au premier abord, grâce à une jolie plume, pas simpliste pour un sou, Isabel Vincent nous amène là où ça fait mal par le biais des échanges entre ces deux âmes en quête de réconfort.
Attention, le lecteur/trice qui s’attend à trouver en Edward un sage donneur de conseils à la Bocuse a tout faux. Il est beaucoup plus subtil que Claude le routinologue !
Au-delà des répits apportés par ces dîners, c’est en effet une relation profonde (et parfois ambigüe sur la fin) qui s’instaure entre le cuisinier et la journaliste déprimée.
Entre références bibliographiques et musicales, découverte insolite de New York et récits de vie narrés, ce mentor au caractère bien trempé est d’autant plus étonnant qu’il ne donne pas de conseil, car sa personnalité joviale goûtant l’instant présent, malgré ses douleurs physiques et morales, est une leçon de vie à lui tout seul.

Ce roman ne nous dit qu’une seule chose : ce qui compte, ce qui fait de nous des êtres emplis d’humanité, ce sont les HISTOIRES que nous racontons, que nous nous racontons. La création culinaire, comme toute création, n’est pas une thérapie, mais elle peut se révéler hautement thérapeutique quand elle permet de donner autant que de recevoir, quand elle fait le lit de CES histoires.

 

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