L’école du cerveau de Olivier Houdé

Résumé éditeur

Professeurs, parents, éducateurs, psychologues, vous trouverez dans ce livre les grands jalons et repères de l’histoire de l’éducation.

Professeurs, parents, éducateurs, psychologues, vous trouverez dans ce livre les grands jalons et repères de l’histoire de l’éducation et de la psychologie de l’enfant. Vous y découvrirez aussi la synthèse des résultats les plus actuels des sciences cognitives et du cerveau sur les apprentissages : lire, écrire, compter, penser (ou raisonner) et respecter autrui.

Cela constitue une véritable boîte à outils de départ, unique en son genre, pour s’initier à la neuropédagogie ou neuroéducation : portraits historiques (Montessori, Freinet et Piaget), schémas, encarts explicatifs, images du cerveau, exemples d’expériences, pistes pratiques (allers-retours du laboratoire à la classe) et 245 références bibliographiques en français et en anglais pour aller plus loin.

★★★★★ Que du bonheur !

Critique

Je pense depuis longtemps que toute proposition pédagogique, quelle qu’en soit sa forme, quelle qu’en soit son public révèle de façon implicite ou explicite les conceptions que l’enseignant se fait de l’apprentissage. Enseignante et formatrice d’enseignants, le livre L’école du cerveau ne pouvait donc que m’intéresser.

Au début des années 2000, son auteur, Olivier Houdé ainsi que son équipe, ont montré pour la première fois sur une imagerie cérébrale d’un cerveau d’élève l’impact d’une intervention pédagogique. Ce fut alors une révolution, car dorénavant les effets positifs d’une situation d’apprentissage pouvaient être validés par la neuroimagerie.
Cet ancien instituteur belge, devenu professeur à l’Université de Psychologie, puis directeur d’un laboratoire du CNRS de psychologie du développement et de l’éducation de l’enfant explique en préambule dans son livre que c’est lui qui a introduit le terme de « neuropédagie » (mais on peut aussi dire « neuroéducation »), nom qui désigne dorénavant le lien entre les sciences cognitives, l’éducation et les neurosciences.

Nous savons tous qu’il n’est pas une semaine sans que soit publiée dans les divers médias une découverte, ou un livre montrant un lien entre la cognition et les neurosciences ; les enseignants d’aujourd’hui, devant la délicate entreprise qui est la leur, sont donc particulièrement à l’affut de toutes propositions mêlant sciences et pédagogie en capacité d’éclairer efficacement leur rapport aux savoirs de leurs élèves.

L’auteur de L’école du cerveau commence son propos en écrivant une première partie très dense dans laquelle il remonte jusqu’à l’antiquité pour lister tous ceux qui se sont intéressés de très près à la pédagogie enfantine. Soyons honnête, cette traversée particulière de l’Histoire m’a d’abord agacée, car je n’y trouvais là rien que je ne connaisse (plus ou moins) déjà.
Mais était-ce vraiment une perte de temps ?
Que nenni !
Rapidement, mon impression désagréable de départ s’arrêta, quand de Platon à Maria Montessori, en passant par Jean Piaget, Jérôme Bruner, et Vygotski… sans oublier Jean Itard (mais si… vous savez … « Victor l’enfant sauvage » « filmé » par Truffaut), JJ Rousseau, Célestin Freinet, et j’en passe, Olivier Houdé raconte les défis, les découvertes, les échecs aussi, de tous ces précurseurs. Ceux qui, déjà confrontés à la dure réalité des enfants à enseigner, en émettant un postulat d’éducabilité pour tous     « dans une société inclusive » ( terme repris aujourd’hui pour parler d’intégration pour les élèves handicapés ) ont tenté de changer le monde à leur façon malgré les vicissitudes rencontrées.

« L’éducation est l’arme la plus puissante qu’on puisse utiliser pour changer le monde » Nelson Mandela

C’est ce vent d’espoir et d’entreprenariat que j’ai retrouvé dans cette première partie ; car les apports dans une synthétisation – certes parfois fastidieuse à lire (c’est un ouvrage de chercheur pas du Guillaume Musso) – en venant rafraîchir ma mémoire ont reposé intelligemment tous les préalables nécessaires à toutes formes d’enseignement, et m’ont mis du baume au cœur face à la tâche chaque année plus grande qui est la nôtre.

Ils sont donc tous là – les GRANDS PIONNIERS PRECURSEURS de la pédagogie moderne – pour nous rappeler avec force que dans l’enseignement magistral-vertical-collectif-classique on oublie trop souvent « qu’un organisme passif n’apprend pas ou mal ». « Certes, on éduque trop souvent en aveugle des millions de cerveau sans connaître assez bien les mécanismes internes du cerveau humain qui apprend. » O.Houdé
Ce dernier et sa « bande » n’ont de cesse à travers ces courtes biographies de marteler la nécessité d’une pédagogie fondée sur « l’action, la pratique, les essais-erreurs et le projet. »

Dans la deuxième partie de l’ouvrage, c’est sous l’éclairage moderne de l’imagerie cérébrale que l’étude des processus mentaux de l’apprenant est poursuivie pour permettre aux enseignants de s’éloigner de ce qu’on a appelé « l’apprentissage par conditionnement ».

On peut y lire le bilan des dernières recherches en neuropédagogie, les découvertes qui éclairent ce que l’on sait des conditions optimales pour construire des séances d’apprentissage efficaces. Même si là encore j’ai retrouvé le ton universitaire de son auteur (en même temps j’avais bien compris que je n’avais pas un polar nordique entre les mains), plein de petites lumières se sont tout à coup allumées au-dessus de moi. Ce n’est pas moi qu’elles éclairaient (c’est mal me connaître !) mais nombre de gestes professionnels, étayages d’enseignants, types de communication entre formé et enseignant… que l’on met généralement en place de façon intuitive (et souvent même en dehors des clous ) sans en avoir reçu la validation scientifique. C’est dorénavant choses faites grâce au livre L’école du cerveau, et c’est appréciable.

Voici quelques-uns des plus fameux, dans un ordre non calculé. Vous en reconnaîtrez certains, en découvrirez d’autres…
1. Le neurofeedback ou retour réflexif après toute séance, ou action cognitive (voir aussi Les passionnants ouvrages de Mireille Brigaudiot comme PROG sur ce sujet).
2. L’importance de l’émotion positive des apprenants qu’elle soit individuelle ou collective. Elle peut être par ailleurs liée à un engagement actif, à la curiosité, au retour d’information et à la correction d’erreur.
3. L’utilité du travail de groupe (voir aussi Faire construire des savoirs de De Vecchi) et de ses effets favorables sur l’essentielle conscience de soi.
4. Les liens entre le travail de mémoire et la consolidation des connaissances. Quel serait le meilleur espace temporel à appliquer entre les séances ?
5. Les besoins de sommeil et de repos dans les apprentissages dès le plus jeune âge.
6. Les liens entre les gestes d’écriture et les apprentissages langagiers écrits.
7. Les stratégies d’organisation des notions à mémoriser. De quelles manières peut-on structurer les informations afin d’en faire une synthèse efficace (classement, catégorisation, création de plan, tableau, frise ou schéma, carte mentale, organigramme ou arborescence…) dès les petites classes ?
8. Les types de répétition à préférer lors des épisodes de mémorisation.
9. L’association des informations enseignées à lier avec des connaissances plus personnelles épisodiques de l’enfant.
10. La question du contrôle cognitif dans les contraintes cérébrales précoces et avec elles la stratégie de raisonnement qui inhibe les automatismes habituels – certes compliquée au première abord mais passionnante à mon sens. On y retrouve toutes les activités où l’enfant s’exerce à inhiber, stopper une action, une réponse (Yoga, méditation, jeu « 1 2 3 soleil », « Jacadi », « ni oui ni non », « jeu de la statue », « jeux avec règles »…).
Petit bonus à ce sujet : ces histoires de « contraintes cérébrales précoces » ne concernent pas seulement les apprentissages scolaires classiques, tel que lire-écrire-compter-penser-raisonner, « mais aussi le contrôle de soi pour la tolérance et la paix. »

« En effet le développement social de l’enfant est lui-même caractérisé par un mécanisme d’inhibition comme dans les aspects cognitifs, mécanisme qui joue un rôle clé pour apprendre à considérer le contrôle de soi, le point de vue d’autrui… »
« Apprendre à inhiber dès l’enfance cet égocentrisme du cerveau c’est éduquer à la tolérance. Il s’agit de se construire une théorie de l’esprit du cerveau de l’autre et surtout de l’exercer. »

Passionnant !

Alors, je n’ai qu’un conseil, plongez dans cet ouvrage de chercheurs !
Même si évidemment, j’en entends dire (et ils ont raison) que ces informations devraient être données en interne, que les mettre en application prend du temps, que nous manquons de moyens, que nos élèves sont comme ci, que les parents sont comme ça, que la hiérarchie…, et patati et patata. Vous avez raison.
Mais, hélas, au quotidien, si l’on veut avancer, on n’est jamais mieux servi que par soi-même, car…      « Qui se nourrit d’attente risque de mourir de faim ! ».

Enfin, reste à l’issue de cette lecture à transférer les informations dans l’espace-classe, en postures, en savoir-faire…en interactions, élève-adulte. Et si c’était déjà fait, nous les poursuivrons, les affinerons, en savourerons les effets, ravis que nous sommes de mettre enfin du sens à nos précédents actes professionnels.

Les chercheurs s’intéressent au quotidien de la classe ; ils nous ont fait un beau cadeau en nous expliquant leurs découvertes.
L’école du cerveau nous les rend digestes (si, si quand même, les publications de départ devaient être carrément illisibles). Le reste s’écrit dans les classes de cours, avec enfants, avec adolescents, avec adultes… en n’oubliant pas qu’on apprend en partageant, en échangeant, plus qu’en polémiquant, parce que des enseignants qui apprennent, ce sont des élèves qui réussissent.

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