Résumé éditeur :
L’idée de passer tout l’été coupés du monde angoissait Franck mais enchantait Lise, alors Franck avait accepté, un peu à contrecœur et beaucoup par amour, de louer dans le Lot cette maison absente de toutes les cartes et privée de tout réseau.
L’annonce parlait d’un gîte perdu au milieu des collines, de calme et de paix. Mais pas du passé sanglant de cette maison que personne n’habitait plus et qui avait abrité un dompteur allemand et ses fauves pendant la Première Guerre mondiale. Et pas non plus de ce chien sans collier, chien ou loup, qui s’était imposé au couple dès le premier soir et qui semblait chercher un maître.
En arrivant cet été-là, Franck croyait encore que la nature, qu’on avait apprivoisée aussi bien qu’un animal de compagnie, n’avait plus rien de sauvage ; il pensait que les guerres du passé, où les hommes s’entretuaient, avaient cédé la place à des guerres plus insidieuses, moins meurtrières. Ça, c’était en arrivant.
Serge Joncour raconte l’histoire, à un siècle de distance, d’un village du Lot, et c’est tout un passé peuplé de bêtes et anéanti par la guerre qu’il déterre, comme pour mieux éclairer notre monde contemporain. En mettant en scène un couple moderne aux prises avec la nature et confrontés à la violence, il nous montre que la sauvagerie est un chien-loup, toujours prête à surgir au cœur de nos existences civilisées.
★★★★★ Que du bonheur !
Avis :
Voici le troisième roman que je lis de Serge Joncour.
J’avais été emportée par “Repose-toi sur moi”, doux et puissant à la fois, pas emballée du tout par “Nature humaine”, la densité du texte me l’avait fait tomber des mains.
J’ai persévéré avec “Chien-Loup”, et j’ai bien fait.
Mon cœur sensible a relevé cette fois encore sa puissante capacité à raconter le couple, et toute la force qui peut s’en dégager. La complémentarité des personnalités, malgré les dissemblances est racontée avec justesse.
Roman d’amour donc, mais aussi roman d’initiation, roman historique (voir la biblio en fin d’ouvrage), roman psychologique, roman économique. Chien-loup c’est tout ça à la fois, et j’ajouterais encore “roman à suspens”… car là, on est gâté(e). Un vrai page turner par moment.
Evidemment, le fil conducteur c’est la Bête, le chien-loup de 2017 qui s’invite chez Franck et Lise lors de leurs vacances au cours desquelles ils sont coupés du monde, et les fauves de 1914… installés au-dessus du même village, ou presque, du Lot qui vit les conséquences directes du départ des hommes pour les tranchées en 14.
Oui, avec Serge J. la campagne ne s’éloigne jamais, cette fois, on ne la quitte pratiquement pas, elle est un des personnages principaux. Il l’aime, et en parle à chaque fois bougrement bien. “Retour à l’état sauvage” aurait pu cette fois encore en être le titre. Ce qui n’est pas pour me déplaire.
Il y a aussi les (jeunes) loups qui rampent dans l’entreprise de Franck, le producteur de cinéma (thème fort bien développé) , les lions et les tigres du dompteur allemand de 1917, et bien évidemment LE chien-loup sans maître qui rode autour de la maison isolée (ce qui est un euphémisme).
Mais qui sont les vrais fauves dans cette histoire qui compare aussi deux mondes, à 100 ans d’écart ?
Cette histoire de reconnexion à la nature et de déconnexion des réseaux internet m’a tenue en haleine. Les drames humains qui se jouent dans chacun des récits et le fil du récit sont bien rendus. On ne sait absolument pas comment les évènements se termineront, s’ils se terminent un jour…
Je n’ai pas retrouvé certaines redondances qui m’avaient lassée dans “Nature humaine”.
Cette fois, les deux histoires qui se croisent au gré des chapitres nous rapprochent de la nature, on se retrouve à l’écoute de soi, de ses besoins vitaux, à ses sensations corporelles, à ce que nous disent nos peurs aussi.
Le passé raconté nous emporte au cœur de la campagne française et nous apporte au passage nombre d’informations sur le traitement des animaux entre 14 et 18 (massacre de 11 millions de chevaux, etc…). Deux histoires s’enchâssent l’une dans l’autre…
Comment l’humain s’adapte-t-il ? Comment réagit-il ? Qu’en est-t-il des animaux domestiques ? Des animaux sauvages ? Quel est le plus animal entre le sapiens et le non sapiens ?
Il faudra tenir jusqu’à la dernière page pour connaître le dénuement ; j’ai tourné les pages comme si j’avais lu un polar au suspens insoutenable.
Serge Joncour m’a emmenée sur plusieurs versants, de l’intime, de l’histoire générale, du rapport animal homme, de la représentation du passé et du paradoxe de certains progrès…
Un bien beau roman que je recommande sans hésitation !