Résumé éditeur
Voici Jean-Pierre Chabrol devenu le père de son père. Il est cet homme qu’il ne savait pas aimer à ce point-là et dont un malentendu le sépara trop longtemps, ce bonhomme couleur muraille, qui, de 1890 à 1970, traversa le siècle, et quel siècle!…
La main dans les poches, paisible comme un volcan mal éteint, faisant front, mine de rien, avec son petit, à la ronde infernale des femmes à l’amour dévorant, grand-mère, mère, épouse, bru, maitresses…
Dans cette Cévenne tendre et violente où le pire et le meilleur ne se passent pas forcément entre le temple et le syndicat, entre l’évangile et le marxisme, où la griffe peut jaillir du gant de velour, le fiel du miel.
Son père, sa mère, Mac Orlan, Brel, Brassens, Aragon…, tant de ses proches tombaient autour de lui que, » cerné de près par les enterrements « , le romancier avait perdu le gout de l’écriture.
Il lui a fallu dix ans pour e retrouver, mais avec quelle passion!
Il n’écrit pas, il ressuscite…
L’auteur ne ménage personne, et surtout pas lui-même, dans le roman de cette tribu chaleureuse et inquiétante dans laquelle les étrangères avaient tant de mal à se faire accepter.
La figure du père illumine le récit.
Rarement être fut plus doué pour le bonheur… Un bonheur qu’il semait autour de lui à pleine main.
Le père de Jean-Pierre Chabrol était manchot.
★★★★★ Que du bonheur !
Critique
Avec le bonheur du manchot, le formidable conteur qu’était le regretté Jean Pierre Chabrol nous invite à un retour mélancolique et culpabilisé sur son père, Silvin Chabrol, l’ancien instituteur (probablement) né manchot, et plus précisément sur leurs rapports fils – père.
Dans cette émouvante et nostalgique balade cévenole de la première moitié du XXème siècle, il nous offre le portrait d’une famille et surtout d’une époque, qui avait ses avantages (et ses inconvénients), une « civilisation rurale chargée de peine et de poésie » dont on peut dire, sans se tromper, que les rapports humains étaient d’une autre teneur que ceux d’aujourd’hui.
Il est certain qu’une fois les parents partis éternellement, les regrets parfois nous empoignent très douloureusement. Et quand on s’introduit subrepticement dans leur histoire, certains moments mal partagés, les non-dits qui en découlent font que leur absence devenue irrémédiable prend alors une autre teinte, celle des déchirants remords.
En allant piocher dans les lettres, les témoignages, en sentant l’âme du père faire corps avec le sien, c’est grâce à une « exaltation créatrice » comme incarnée que l’auteur parviendra à nous livrer ce magnifique témoignage tout à la fois intimiste, cultivé, historique, et éperdu d’un amour, quant à lui probablement immortel.
» Il en faut des années pour rendre à l’auteur de ses jours ce qui lui est dû, en respectueux hommage. » JP Chabrol
Et c’est rarement une chose à laquelle on pense de leur vivant, car pour vivre ensemble ne faut – il pas d’abord apprendre à s’écouter pour pardonner ?
Ce livre m’a beaucoup touchée et nourrie humainement.