Résumé éditeur
Sous le regard émerveillé de leur fils, ils dansent sur « Mr. Bojangles » de Nina Simone. Leur amour est magique, vertigineux, une fête perpétuelle. Chez eux, il n’y a de place que pour le plaisir, la fantaisie et les amis.
Celle qui donne le ton, qui mène le bal, c’est la mère, feu follet imprévisible et extravagant. C’est elle qui a adopté le quatrième membre de la famille, Mlle Superfétatoire, un grand oiseau exotique qui déambule dans l’appartement. C’est elle qui n’a de cesse de les entraîner dans un tourbillon de poésie et de chimères.
Un jour, pourtant, elle va trop loin. Et père et fils feront tout pour éviter l’inéluctable, pour que la fête continue, coûte que coûte.
L’amour fou n’a jamais si bien porté son nom.
★★★★★ Que du bonheur !
Critique
Tout est langage.
Il y a d’abord les mots des autres lecteurs, ceux qui m’ont convaincue de me jeter dans le premier roman d’Olivier Bourdeaut : pouvoir des mots et délice des échanges annonciateurs de plaisir littéraire.
Et puis, il y a LA langue du livre, du succulent En attendant Bojangles.
Dès les premières phrases, vous savez que vous êtes emporté(e), que les mots vous ont attrapé les mains et le coeur.
Pourquoi ?
Parce qu’un jeune narrateur nous y raconte dans un style étourdissant son quotidien avec ses parents d’un anticonformisme et d’une fantaisie de tous les instants. Il nous annonce pour commencer que son père a d’abord été chasseur de mouches au harpon.
Le cadre de la folie douce, du décalage à toute épreuve est posée. L’écriture y participant à tous les instants d’une manière joyeuse et tonitruante.
Attention, on y risque de sourire plus qu’à l’accoutumée. Et vue la grisaille ambiante, ça va nous faire du bien.
Mais le livre va plus loin encore que ces plots humoristiques placés là et là encore et cet effet stylisé bien particulier.
Les personnages de ce roman sont emplis d’une gaieté lyrique qui respire la joie de vivre.
« S’esclaffer », « rire », « hilare », « imbécile heureux », « regard rieur », « guillerette »… sont les déterminants déposés partout dans ce texte qui me semble être une véritable apologie de la joie.
La maman qui tutoie les étoiles car habitée d’une folie douce sera la boussole de cette famille en lui délivrant une vie hors du commun où les soubassements y sont faits d’un amour incommensurable.
Les chapitres alternent entre tantôt le point de vue du père et celui du fils.
Le fils, bon narrateur, mais personnalité naïve nous relate une existence généreuse et borderline, et par les sous – titres qu’il met aux actions des adultes colore de sa candeur et innocence leur drôle de langage parental.
La rencontre amoureuse entre le père et la mère est un succulent moment d’anthologie dans le registre Mademoiselle « Foldingue » et Monsieur « Je cherche une vie la plus éloignée possible des gens parfumés à l’ennui ».
On découvre dans ce livre rappelant un peu l’attrape – cœur de Boris Vian, dans le désordre, et de manière non exhaustive :
Nina Simone,
des fêtes à n’en plus finir,
un prénom différent pour chaque jour pour la mère,
un oiseau élégant et incroyable,
beaucoup beaucoup de rires (voir le lexique relevé plus haut) ,
de la désinvolture,
beaucoup de dérision,
une maitresse d’école pas piquée des vers (ça sent le petit règlement de compte d’un auteur dyslexique malmené par l’institution scolaire),
une absence de sérieux évident,
du lâcher prise,
l’équilibre esthétique,
etc…
Le rythme de ce texte épouse celui du superbe titre de Nina Simone : En attendant Bojangles.
» Jazz » quand tu nous tiens, tu colores l’existence d’une teinte sucrée – salée irrésistible !
« Come back and dance, dance, dance, please dance »
« Revenez et dansez, dansez, dansez, s’il-vous-plaît, dansez » Chante Nina Simone, et tandis que monsieur Bejangles danse pour faire revenir son chien, la mère s’étourdit répétitivement pour faire revenir monsieur Bojangles !
C’est sûrement l’une des raisons qui font que ce roman, tendre et loufoque au premier abord, doit son succès à l’état d’esprit qui s’en dégage ; il est un joli pied de nez à la morosité actuelle, et à la monotonie du quotidien, et pour servir le postulat » carpe diem » l’inventivité d’Olivier Bourdeaut est sans limites.
Le passage à l’école publique gratuite et laïque du jeune narrateur est un moment d’anthologie, de même que les cours donnés à la maison auraient ravi les libres enfants de Sommerhill.
Ce roman est un roman malin, comme le fait d’avoir alterné les chapitres avec la vision de père et celle du fils. Sachant que nous découvrons d’abord l’affaire sous les yeux du jeune garçon avant de découvrir les nuances du mari, et par là même les réalités de l’intrigue, les ressorts du problème.
La leçon que nous distille ce jeune garçon, personnage central du livre et narrateur, c’est que nous pouvons décider de devenir l’acteur principal de notre vie en y insufflant confiance, tendresse, patience, bienveillance et, bien sûr, JOIE.
Et ce également quand la vie nous envoie « des cochonneries », puisque le message n’est-il pas alors d’apprendre à donner » un coup de pied à la raison « , de » faire des bras d’honneur au plus de conventions possibles », et de » tirer la langue aux qu’en-dira-t-on « .
Quand la vie se complique, l’important est alors de réaliser où s’arrête notre folie (douce ?) et où commence la folie pure, notre folie et celle des autres, même si c’est plus facile à faire dans l’imaginaire des livres que dans la vraie vie.
Cette lecture s’est révélée , vous l’aurez saisi, pour moi (parmi tant d’autres), comme un immense moment de bonheurS.